Encouragé
par l’attitude américaine et un Donald Trump qui pourrait « déchirer »
l’accord sur le nucléaire, le 12 mai, comme il l’a déclaré avec son
élégance habituelle, Benyamin Netanyahou pousse de tous les feux
possibles pour faire monter la tension avec Téhéran. Et il semble même
prêt à aller jusqu’à la guerre.
À l’approche de cette date butoir et en direct devant les
télévisions israéliennes, le premier ministre israélien a présenté de
manière théâtrale ce qu’il a appelé « les copies exactes » de dizaines
de milliers de documents originaux iraniens obtenus il y a quelques
semaines. Ces documents, servant de décor à la déclaration de
Netanyahou, auraient été déplacés en 2017 dans un lieu secret et
apparemment délabré à Téhéran. Cette demi-tonne de matériel contient
des « preuves nouvelles et concluantes du programme d’armes nucléaires
que l’Iran a dissimulé pendant des années aux yeux de la communauté
internationale dans ses archives atomiques secrètes », a-t-il affirmé.
Pour le quotidien israélien Yediot Aharonot, souvent critique de
Netanyahou, les documents produits sont un « plat de pâtes réchauffées
servant l’image du premier ministre ».
Israël se sent renforcé par l’attitude de la France
À aucun moment, cependant, Netanyahou n’a été capable de
montrer que l’Iran ne se conformait pas à l’accord. Or c’est le plus
important. Ce qui tend à démontrer que le but recherché est autre, comme
le prouvent les tirs de missiles sur des positions militaires
syriennes, dimanche soir, et qui auraient tué de nombreux combattants
iraniens. Tout désigne Israël, malgré le mutisme de Tel-Aviv.
C’est dans ce contexte de tension grandissante que le
Parlement israélien a voté, lundi, en faveur d’une loi permettant au
premier ministre et au ministre de la Défense de décider d’entrer en
guerre sans réunir le gouvernement. Cette loi, votée à 62 voix contre
41, donne la responsabilité au cabinet restreint de sécurité de décider
d’une opération militaire ou d’une guerre sans se concerter avec le
reste du gouvernement. Pis, un paragraphe précise que, en cas de
« conditions extrêmes », le premier ministre et son ministre de la
Défense, seuls, pourront décider d’une telle opération.
Benyamin Netanyahou a bien évidemment reçu le soutien des
États-Unis. Le nouveau secrétaire d’État américain, Mike Pompeo,
actuellement en tournée au Moyen-Orient, avait donné le ton en Arabie
saoudite, en assurant que l’Iran est « le plus grand sponsor du
terrorisme dans le monde » qui « vend des armes aux (rebelles) Houthis
au Yémen », « dirige des campagnes de piratage informatique » et
« soutient le régime meurtrier d’Assad » en Syrie. Et en Israël, sans
pratiquement un mot sur les Palestiniens – on aura juste appris que le
fameux plan de paix américain n’existe toujours pas –, il s’en est
encore pris à Téhéran, accusé de vouloir « dominer le Moyen-Orient ». De
telles affirmations dans un pays, Israël, qui n’a jamais avoué
officiellement détenir l’arme atomique et de la part d’un pays, les
États-Unis, qui possède des bases militaires dans toute la région,
relèvent du mépris pour la communauté internationale.
Les accusations israéliennes sont l’œuvre d’« un menteur
invétéré, en panne d’idées », a dénoncé le ministère des Affaires
étrangères iranien, ajoutant que ces allégations « éculées, sans intérêt
et honteuses » sont celles de « dirigeants sionistes (qui) ne voient
pas d’autre moyen pour assurer la survie de leur régime illégal que de
menacer les autres en usant d’un bluff ressassé ».
Netanyahou peut également se sentir renforcé par
l’attitude de la France. Emmanuel Macron, tout en voulant préserver
l’accord de 2015, veut l’élargir de façon artificielle, en incluant les
missiles balistiques ainsi que la situation en Syrie et au Yémen, ce qui
rejoint totalement les volontés et les analyses états-uniennes, alors
que, en réalité, ces dossiers importants pourraient être l’objet de
discussions séparées. Encore une fois, en jouant la carte de
l’atlantisme et sans jamais critiquer Israël, Paris renforce le camp des
faiseurs de guerres, car les tensions sont maintenant grandissantes. Le
Moyen-Orient est plus que jamais au bord de l’explosion.